C’est avec un immense plaisir et honneur que j’offre SSAFT comme plateforme pour que Patrick Laurenti, Maître de Conférences à l’Université Paris VII et chercheur dans l’équipe Evolution moléculaire et fonctionnelle des familles multigéniques du LEGS, au campus de Gif sur Yvette, puisse écrire ce bien joli billet d’humeur sur le mythe tenace du fossile-vivant. [En 2020 P. Laurenti a rejoint le LIED]
Parmi les mythes à la peau dure s’il en est un qui m’énerve au plus haut point, c’est bien la notion de fossile-vivant ou de son équivalent en jargon scientifique : l’espèce panchronique. En France, le grand propagateur de ce mythe dans le milieu scientifique fut Pierre-Paul Grassé qui, paix à ses cendres, a perdu en la matière une bonne occasion de se taire. Ce mythe prend son origine dans le mélange des genres que pratiqua Teilhard de Chardin qui, prêtre et paléontologue, développa une vue providentialiste de l’évolution histoire de réconcilier ses conceptions scientifiques et sa foi.
Theilhard soutenait que chaque composante de l’univers (dont les espèces vivantes) subirait une force qui orienterait son évolution vers un stade de perfection ultime : le point Oméga. Une fois que chaque partie aurait atteint son point Oméga, l’univers atteindrait son point de perfection ultime : le Christ cosmique. Comme chaque composante voyage à son rythme vers son point Oméga, certaines espèces l’atteignent avant d’autres et cessent donc d’évoluer en attendant le Christ cosmique, la fin des temps ou le jugement dernier (barrez la mention inutile). Ne riez pas, à l’époque les plus fortes critiques contre cette vue de Teilhard ne vinrent pas de la communauté scientifique, mais de l’église catholique qui trouva que les conceptions du bon père fleuraient trop fort le bouddhisme pour être canoniques.
Les espèces vivant à un moment donné découlent toutes d’une histoire évolutive unique qui s’étend sur une seule et même période : en d’autres termes, si on pioche à une période donnée, une dizaine d’espèces, on pourra dire qu’elles proviennent chacune d’une histoire évolutive qui leur est propre, mais par contre qui s’est écoulée sur une même durée. Aussi, il est faux de distinguer, au sein d’espèces contemporaines, des espèces dites « supérieures » ou « plus évoluées » et d’autres « inférieures » ou « peu évoluées ». Deux espèces contemporaines ont tout simplement des parcours évolutifs qui différent à partir de leur dernier ancêtre commun.
Si la clarification des relations phylogénétiques entre les espèces a conduit les évolutionnistes à abandonner le concept de fossile-vivant, un certain nombre de vulgarisateurs ou de chercheurs scientifiques continuent contre toute évidence de propager ces notions entachées par la rémanence du concept d’échelle des êtres, une échelle présentant une hiérarchie des espèces vivantes et au sommet de laquelle trône bien entendu Homo sapiens…
Ainsi, le Ginkgo (Ginkgo biloba), les nautiles dont Nautilus macromphalus ou les cœlacanthes Latimeria chalumnae et Latimeria menadoensis, qui sont des espèces survivantes actuelles de groupes d’espèces autrefois florissants, sont décrites comme des « fossiles-vivants », laissant penser à tort que ces espèces n’auraient pas évolué depuis des dizaines de million d’années.
Naïf et emporté, je me suis longtemps laissé aller à contre-argumenter pour souligner que si ces espèces avaient apparemment peu changé du point de vue morphologique, cela ne prouvait rien car seuls 5% des gènes sont impliqués dans la « fabrication » morphologique (grosso modo l’apparence) d’un organisme. On peut ajouter qu’un véritable fossile, ça reste franchement peu informatif sur de nombreux critères d’apparences ! Qui nous dit que le chatoiement des écailles du cœlacanthe n’a pas changé ? De plus, la plupart des mutations étant neutres, la stabilité morphologique n’implique pas l’absence de mutations ce qui signifie qu’on peut évoluer, sans trop changer de morphologie…
Mais j’ai réalisé il y a peu que ce faisant je tombais dans un piège grossier car la stabilité morphologique au cours du temps de ces « espèces panchroniques » n’est rien d’autre qu’un véritable mythe.
En regardant de plus près l’exemple favori de Grassé, les cœlacanthes actuels (Latimeria chalumnnae et L. menadoensis), je me suis rendu compte que le mythe de leur « panchronie » est basé sur – au moins - quatre affirmations fausses. Je cite :
- le cœlacanthe actuel existe depuis les temps fossilifères ;
- la morphologie a peu évolué dans la famille des cœlacanthes ;
- si la morphologie évolue peu alors l’anatomie et la biologie des cœlacanthes a également peu évolué ;
- et enfin, le cœlacanthe actuel n’évolue plus.
La première affirmation (« le cœlacanthe actuel existe depuis les temps fossilifères ») est implicitement contenue dans la notion même de panchronie : pour qu’il y ait « fossile-vivant », il faut qu’il y ait fossile, non ? Or, tenez-vous bien, même s’il existe bien des fossiles du groupe des cœlacanthes depuis les temps fossilifères (des fossiles de Coelacanthiformes) aucun fossile des espèces actuelles (Latimeria chalumnnae et L. menadoensis) ni même du genre Latimeria n’ont été découverts à ce jour ! En d’autres termes, si les cœlacanthes actuels sont incontestablement vivants, il n’en existe aucun fossile !
Tenez-vous mieux que tout à l’heure, la deuxième affirmation est tout aussi fantaisiste. Les espèces fossiles de Coelacanthiformes les plus proches de Latimeria, telles celles du genre Macropoma éteint depuis environ 100 millions d’années, sont morphologiquement très différentes des cœlacanthes actuels. Non seulement les cœlacanthes actuels font une taille supérieure au mètre pour environ 60cm pour Macropoma, mais les os qui peuvent être comparés (notamment au niveau de la face et de la base des nageoires) sont extrêmement dissemblables.
Squelette de Latimeria actuel et de son plus proche parent identifié Macropoma lewesiensis, fossile du Crétacé (environ – 100 Ma).
Dessin extrait de Peter Forey, History of the Cœlacanths, Springer, 1998.
Pour corser le tout, il a été montré récemment que la vague ressemblance morphologique entre les nageoires de Latimeria et des fossiles de cœlacanthes dont nous disposons cache en réalité des différences anatomiques importantes : en 2007, Matt Friedman, Michael Coates et Philip Anderson ont étudié un des rares fossiles de cœlacanthe du Dévonien (Shoshonia arcopteryx) où le squelette de la nageoire soit visible. Figurez-vous, s’il vous plait ça fait trois fois que je vous demande de vous tenir, que si chez Latimeria, les os radiaux sont disposés de façon symétrique par rapport au squelette axial de la nageoire charnue, et bien ils sont disposés de façon dissymétrique chez Shoshonia. Sacré différence tout de même !
Comparaison du squelette de la nageoire charnue de Latimeria chalumnae et de Shoshonia arcopteryx, fossile du Dévonien moyen (environ – 380 Ma)
Dessin Friedman et al. (2007). Evolution & Development, 9:4, 329–337.
Enfin, cerise sur le gâteau, un article qui vient de sortir montre que les populations actuelles de Latimeria chalumnae en Afrique de l’Est présentent des différences génétiques significatives avec leur population mère située aux Comores. En d’autres termes, loin d’être en stase évolutive, les cœlacanthes actuels continuent à s’adapter activement à leur environnement, ça va lâchez-vous vous pouvez rire.
Distribution géographique des haplotypes de Latimeria chalumnae. Les différents haplotypes sont figurés par différentes couleurs, le diamètre des cercles correspond au nombre d’individus échantillonés
Schéma extrait de Kathrin P. Lampert et al. (2012). Population divergence in East African coelacanths. Current Biology. Vol 22 No 11 Pages 439-440
En conclusion, toutes les espèces présentent une mosaïque de caractères dérivés et de caractères ancestraux, il n’existe donc pas d’espèce actuelle basale ou ancestrale, ni de « fossile-vivant ». Une réalité biologique résumée par la fameuse formule de Gene-Herall-Sheridan: the only good fossil is a dead one !
Bonus! Une petite vidéo d’un spécimen de Latimeria chalumnae:
Edit 2020:
Depuis la publication de ce billet, Patrick Laurenti et son collègue Didier Casane ont décidé de compiler une série d'arguments pour déconstruire le concept de fossile vivant appliqué au Cœlacanthe et publié leur analyse dans la revue BioEssays sous le titre 'Why coelacanths are not ‘living fossils’ (disponible en libre accès). Cet article a eu un franc succès et initié de passionnantes discussions par articles de revues spécialisées, billets de blogs (notez les contrarguments de ce billets du dinoblog) et tweets interposés.
Quelques figures tirées de l'article pour vous allécher:
Références:
Peter Forey, History of the Cœlacanths, Springer, 1998
Friedman et al. (2007). First discovery of a primitive coelacanth fin fills a major gap in the evolution of lobed fins and limbs. Evolution & Development, 9:4, 329–337.
Kathrin P. Lampert et al. (2012). Population divergence in East African coelacanths. Current Biology. Vol 22 No 11 Pages 439-440
Casane, D. and Laurenti, P. (2013), Why coelacanths are not ‘living fossils’. Bioessays, 35: 332-338. doi:10.1002/bies.201200145
1 De alain - 23/06/2012, 14:28
Merci pour ce billet. Je dois dire que les juxtapositions fossile/actuel souvent présentées pour justifier l'existence de "fossiles vivants" m'ont toujours semblé aussi peu convaincantes que les juxtapositions présentées d'Harun Yahya dans son Atlas de la Création pour justifier l'absence d'évolution chez tous les êtres vivants. Mais bon, là au moins, vous présentez des données précises. Merci donc. J'avoue être assez tenté de vous demander à quoi ressemblent les fossiles censés être les "sosies" des ginkgos et des nautiles actuels ... mais j'abuse peut-être ?
2 De Patrick Laurenti - 23/06/2012, 16:00
Vous avez totalement raison, c'est le même ressort que Harun Yayha : ces gens affirment haut et fort "c'est identique" sans savoir ce que "identique" signifie de précision pour un biologiste : j'ai par exemple des collègues qui passent leur vie à compter les soies ou les indentations chitineuses sur des penis de drosophile pour attribuer tel ou tel specimen à telle ou telle espèce.
Coté Ginkgo vous appuyez où ça fait mal... C'est Darwin, qui le premier à qualifié Ginkgo de fossile-vivant. Shame on him!
En fait, la pseudo stabilité morphologique au cours des temps repose toujours sur le flou et l'imprécision. On entend toujours "le Ginkgo est stable depuis 250 Ma", mais c'est Ginkgo primigenia qui est attesté à cette époque (Permien), pas G. biloba. Au Jurassique on dispose de fossiles de l'espèce Ginkgo adiantoïdes, dont G. biloba ne pourrait être qu'une sous-espèce - et encore c'est débattu... Pensez de plus que - à ma connaissance, mais je peux me tromper n'étant pas botaniste - "l'espèce" actuelle serait en fait un variant cultivé (ou cultivar) et qu'il n'existerait plus de population réellement naturelle de cette espèce. Un peu comme si on comparait un chien actuel à un ancêtre du loup...
Pour les Nautile c'est pire, on ne dispose que d'empreintes de coquilles, nous n'avons aucune information concernant les parties molles - qui comme leur nom l'indique - forment l'essentiel du corps des mollusques...
3 De nonos - 25/06/2012, 07:40
On dit une faucille bande de d'ignares !
=>
hum ^^',
je ne commente pas généralement, d'ailleurs le fais-je réellement dans le cas présent, juste un petit mot d'encouragement pour ce premier billet bien réussi.
4 De Patrick Laurenti - 25/06/2012, 11:23
@nonos : C'est le genre de commentaire qui me rend marteau
OK je =>
5 De flaac - 25/06/2012, 16:44
Il existe un spécimen de fossile vivant. Le spécimen de Silene stenophylla qui a germé après qu'une graine ai passée environ 30 000 ans dans le permafrost.
Mais ce n'est pas un fossile, puisqu'il n'y a pas eu fossilisation.
6 De Patrick Laurenti - 25/06/2012, 22:29
@flaac : Je ne connais pas cet exemple, mais effectivement c'est un des rares exemples (avec ceux de tardigrades réveillés des glaces ou de bactéries extraites de cristaux de sel) où l'on pourrait parler de "fossile vivant" car, en dormance, ces organismes traversent le temps sans évoluer. On ne va pas chipoter et leur faire procès de ne pas être minéralisés, puisqu'on a pris l'habitude d'appeler fossile - improprement peut être - les animaux congelés dans le permafrost tels que les mammouths.
7 De alain - 25/06/2012, 22:46
@ Patrick Laurenti #2 : concernant les biologistes dont la vie entière est dédiée à la chétotaxie et à la scrutation scrupuleuse des genitalia sous bino, ne seraient-ils pas ce qu'on appelle des ... enculeurs de mouche ? Ok je sors ;)
8 De bob - 25/06/2012, 23:38
Excellent billet !
9 De Patrick Laurenti - 26/06/2012, 00:37
@alain : Ayant été moi-même drosophiliste, je sais qu'il y a deux manières de le faire : avec ou sans leur consentement !
10 De Patrick Laurenti - 26/06/2012, 00:41
@flaac : Je viens d'aller voir ce papier, c'est fascinant! Merci de me l'avoir signalé, sans vous je serais passé à coté car je ne lis pas en général les papiers sur les plantes (je sais, c'est mal).
11 De sidney - 26/06/2012, 09:49
Salut Patrick, ton article est bien utile quand on voit que les créationnistes de tous poils sont de plus en plus actifs sur le net, en particulier sur les forum de discussion scientifiques et qu'il utilisent ce malheureux le coelacanthe comme preuve de non-évolution :(http://gillovy.skynetblogs.be/archi...)
12 De alain - 26/06/2012, 10:27
@Patrick Laurenti : 1° En tant qu'entomologiste amateur, je suis moi-même un tantinet "tatillon à l'extrême". Une question me brûle les lèvres : Comment reconnaît-on une droso consentante ?
2° J'ai réfléchi à ce que pourrait être une définition intensionnelle de l'expression "fossile vivant". Le premier critère qui me vient à l'esprit est "posséder un fossile morphologiquement très proche (à une vache près)". Avec ça, l'extension de "fossile vivant" comprend des centaines de milliers d'espèces ! Il faudrait donc ajouter un deuxième critère (tout aussi flou que le premier) "l'âge de ce fossile doit se compter en centaines de Ma". Là on limite un peu l'extension mais les bactéries, les éponges, les méduses, les coraux, … feraient bel et bien partie de la liste. Or tous ces taxons ne sont pas, je pense, taxés de "fossiles vivants" ! Ajoutons un troisième critère "la diversité spécifique actuelle doit être très limitée (on doit pouvoir compter les espèces actuelles sur les doigts d'une main de Mickey)". Avec ces trois critères, il nous reste bien la liste classique des "fossiles vivants" : cœlacanthe, ginkgo, nautile, limule, chlamydoselachus, … Bilan : l'intension de l'expression "fossile vivant" est constituée de critères flous (vague ressemblance, ancienneté définie subjectivement) ou non pertinent (que vient faire ici la diversité spécifique ?), c'est donc une expression foireuse.
Ceci dit, on colle parfois l'étiquette "fossile vivant" à des taxons de plus haut rang (requins, crocodiles, scorpions, odonates, …). Là ça me dépasse, j'ai du mal à considéré un groupe entier comme une unité évolutive.
3° Bon, tout ça c'est bien joli mais ça ne nous dit pas pourquoi cette expression a un tel succès ! Je vous propose l'hypothèse suivante : L'expression "fossile vivant" s'accorde parfaitement avec l'idée selon laquelle l'évolution serait une succession de métamorphoses (conception transmutationniste, voir par exemple Corinne Fortin, L'évolution à l'école). Avec cette conception de l'évolution, la morphologie des individus doit forcément se modifier/métamorphoser au cours du temps. Les individus qui ne se sont visiblement pas métamorphosés semblent se placer hors de l'évolution, il sont figés, se sont des fossiles vivants. Bilan : l'expression "fossile vivant" renforce la cohérence et le pouvoir explicatif d'une des théories naïves de l'évolution (conception transmutationnelle).
13 De Patrick Laurenti - 26/06/2012, 14:02
@sidney : Salut Sidney, effectivement on a l'impression que rien n'a changé depuis Pierre-Paul Grassé. Ca fait plusieurs années que j'interviens sur la page wikipedia - où mes étudiants vont chercher leurs infos - dédiée au fossile vivant et je dois refaire la page régulièrement car les créationnistes y interviennent avec obstination. Le plus beau c'est que ce sont les évolutionnistes qui se font taxer d'idéologie. La dernière mode c'est de nous reprocher de "monter en épingle la moindre différence" afin de "nier l'existence des fossiles vivants". Il est vrai qu'en France il traine encore des scientifiques (ou des vulgarisateurs) lamarcko-teilhardiens (pas parmi les jeunes heureusement) qui ont une visibilité médiatique plus importante que les évolutionnistes sérieux. C'est en grande partie du à l'activisme de l'UIP (une pseudo université mais réelle coterie médiatique). Il n'y a qu'à voir la place qu'occupe les élucubration des Jean-marie Pelt, Hubert Reeves et autres frères Bogdanov ! Ceci dit, les choses changent, surtout grâce à l'excellent travail de diffusion de Guillaume Lecointre. Ca prend du temps, mais ça avance : j'ai participé à un ouvrage collectif (pub : Biologie, tout le cours en fiche, sous la direction de D. Richard) qui sort à la rentrée et qui sera, en France, le premier ouvrage généraliste destiné aux licences (les bouquins de Lecointre tapent plus haut ou sont destinés aux enseignants) qui présente la biologie sous un angle phylogénétique. Il était temps 60 ans après Hennig!!! .
14 De jphil - 27/06/2012, 11:43
Bel article!
C'est donc la guerre des mises a jour wikipédia? comme celle d'espèce panchronique, mise a jour le 25 juin? (qui repointe sur l'article de ssaft maintenant ^^)
bon ben vivement les tribulations 2/3 et 3/3
15 De Patrick Laurenti - 27/06/2012, 20:47
@alain : Effectivement! Je serai encore plus sévère que , pour moi le "fossile vivant" relève carrément du transformisme lamarckien et pas du tout de l'évolutionnisme.
16 De M - 27/06/2012, 21:52
Merci pour cette clarification, avec un article très bien écrit ! Le hasard faisant bien les choses, je reviens tout juste de l'excellent Parc national de Miguasha, sur la côte Atlantique du Québec. Il s'agit en fait d'un site présentant une richesse et une diversité de fossiles de l'âge des poissons (le Dévonien, il y a environ 380 Ma) tout bonnement exceptionnelle.
Le musée qui accompagne le site est remarquable également, et la visite guidée que j'ai eu la chance de suivre arrive bien à faire la part des choses pour vulgariser efficacement les concepts d'évolution.
Le clou du spectacle étant l'Eusthenopteron foordi, plus connu sous le nom de prince de Miguasha, un poisson qui partage déjà plusieurs caractéristiques des tétrapodes et est donc une véritable pierre angulaire de l'évolution telle qu'on la conçoit maintenant. À son actif, des nageoires charnues et deux poumons !
Et bien sûr, on y parle d'un de ses proches cousins, le cœlacanthe, qualifié malencontreusement (pas taper !) de « fossile vivant » ! À la décharge des bonnes volontés du musée, l'expression fossile vivant, bien que scientifiquement impropre, prend toute sa dimension lorsqu'il s'agit d'un groupe longtemps crû éteint comme ce fut le cas pour les cœlacanthes !
À noter que le parc est inscrit, depuis 1999, sur la liste du patrimoine mondial de l'UNESCO ! Plus d'infos ici : http://www.sepaq.com/pq/mig/
17 De Patrick Laurenti - 28/06/2012, 13:23
@M : Les musées ont en général un train de retard. J'en veux pour preuve les panneaux qui qualifient de "fossile-vivant" le coelacanthe naturalisé de la Grande galerie de l'évolution et les dipneustes à l'aquarium de la Porte dorée. Ces deux établissements dépendant du Muséum national d'histoire naturelle, j'imagine que Guillaume Lecointre doit être prit d'urticaire chaque fois qu'il passe devant!!!
18 De Franz - 07/11/2012, 02:25
Mon interrogation ne colle pas vraiment avec le thème du sujet que sont les "fossiles vivants", mais bon..:
Sachant que (enfin,..j'espère) l'évolution, obéissant aux règles de la sélection naturelle, traduit une certaine adaptabilité de l'espèce à son milieu, en ce sens que les individus de l'espèce présentant un avantage sélectif (avantageux face à une contrainte du milieu) sont ceux qui persisteront.
Peut t_on parler (même si ce n'est pas général) dans ce cas d'une amélioration, (voire même en exagérant, d'un perfectionnement) des espèces face aux contraintes sans cesse changeantes et grandissantes de leur milieu ?
ma question peut être illustré avec l'exemple un peu grossier que, dans un monde ou l'espèce humaine est exposée à la contrainte grandissante de la pollution atmosphérique, peut_on imaginer dans le futur l'émergence d'individus humain bénéficiaire d'une quelconque innovation génétique ou évolutive leur permettant une tolérance accrue à la pollution au point qu'ils (ces individus) soit représentants de l'espèce dans un futur plus ou moins lointain ??
Si oui, est_ce un phénomène (cette évolution) qui est peut être déjà légèrement observable ou a pu être observé?
19 De bob - 28/02/2013, 05:39
«... sont des espèces survivantes actuelles de groupes d’espèces autrefois florissants, sont décrites comme des « fossiles-vivants »»
Sans oublier l'Homo sapiens, seul survivant du genre Homo ;)
20 De françoise - 04/05/2014, 11:46
Je découvre votre blog fort intéressant.
Pourriez-vous le proposer en lecture zen de telle sorte que les mal-voyants puissent grossir les caractères tout en allongeant le texte, sans sortir de l'écran.
Tout le monde devrait penser à cela.
A une autre lecture, amicalement
Françoise
21 De François Lusignan - 20/05/2014, 19:06
Je cherchais un squelette de cœlacanthe pour un cours et je l'ai trouvé. De plus, n'ayant jamais lu Teilhard de Chardin car, je l'avoue, j'ai toujours préféré Gotlib dans le domaine des farces et attrapes imprimées, j'ai trouvé ici un résumé simple et facile à replacer dans les diners mondains sur les idées du bonhomme. Très bon article. Merci.
22 De fabrice - 30/03/2015, 17:04
Avant tout, bravo pour cette page riche d'informations fort précises et étayées.
J'ai juste quelques frissons lorsque parmi nos têtes pensantes depuis longtemps enterrées, certaines rassemblent le consensus pour être encensées au dépend d'autres jetées dans la fosses des scientifiques honteux. C'est faire peu de cas de l'Histoire des Sciences.
Concentrons nos efforts à démonter les pseudo-raisonnements de nos orateurs de Dieu contemporains (quelque soit le dieu !) et gardons nous de juger nos aïeux à la lumière de nos référentiels actuels. Sans Lamarck ou Buffon, on peut envisager que Darwin eût une analyse fort différente.
Quand on voit le nombre d'enseignants à l'université qui enseignent encore la classification naturelle de Linné ou Cuvier comme référence...
Bon j'y vais peut être un peu fort, d'autant que le ton de l'article m'a par ailleurs beaucoup amusé, donc félicitations encore pour cette page de clairvoyance.
23 De Marc - 17/08/2016, 18:26
Bonjour Patrick, Sympa ton billet. Juste 3 points sur lesquels je ne suis pas d'accord (je vais croire que je suis encore plus "intégriste" que toi ;) ).
D'abord la notion de temps fossilifères n'a aucune base logique. Il faut parler en terme de durée tout simplement.
Deuxième point, tu tombes dans un piège quand tu dis que les deux espèces actuelles ne sont pas connues sous la forme de fossile. Si on trouve un fossile de x millions d'années identique à un Latimeria actuel, tu serais obligé de réviser ta position ! Non, la notion d'espèce n'est applicable qu'à des bestioles actuelles. Dès qu'on veut appliquer ce concept d'espèce biologique à une échelle temporelle de plus d'une génération, on tombe dans des incohérences. De toute façon, sur ce sujet je partage l'avis de Pierre-Henri Gouyon (voir sur dailymotion son exposé dans les Ernest): Le concept d'espèce devrait être oublié en systématique (en écologie, il reste utile). Il y a des continuums spatiaux et temporels mais pas d'entité délimitée strictement.
Dernier point, la notion de genre est encore plus arbitraire que celle d'espèce ! Que les deux groupes actuels de Latimeria (je n'utilise pas le terme espèce) soient du même genre ou pas, cela ne devrait en rien influer sur la conclusion.
Outre ces points, ton billet complète très bien le papier que tu as fait avec Didier. Je l'utiliserai en cours. Merci.
Marc G.
24 De Patrick Laurenti - 04/09/2016, 15:59
Salut Marc,
Merci pour ton commentaire. Pour les lecteurs de passage, Marc Girondot est aujourd'hui professeur d'évolution à Paris Sud (Orsay), mais dans une vie antérieure il était l'un des pionniers de l'enseignement de la phylogénie et a créé à Paris-Diderot le cours de phylogénie qu'il m'a transmis à son départ. C'est dire si je suis honoré de son commentaire !
Pour ce qui est de fossilifères, c'était juste une formule. J'aurais pu dire "les temps géologiques" ou "des millions d'années"... Dans ce billet, je voulais juste pointer ironiquement que quand on se permet de dire "fossile-vivant" il faudrait pouvoir au moins produire des fossiles très ressemblants à l'espèce incriminée. Mais tu as raison, si on retourne l'argument je pourrais être pris à mon propre piège.
La discussion de la notion d'espèce me semble trop ardue pour un blog de vulgarisation. En tout cas, je ne me sens pas capable de la traiter de façon simple sans tomber dans un champ de mines. Il est important bien sur de déconstruire l'aspect essentialiste de l'espèce, mais comment éviter de donner des arguments aux relativistes qui dénient toute vérité aux concepts scientifiques ? On danse sur le fil du rasoir, non? Peut être que quelqu'un de plus talentueux pourrait se lancer... Oui, c'est un appel du pied, je suis sur que Pierre serait ravi de t'ouvrir les colonnes de SSAFT !
Enfin, je suis 1000 pour 100 d'accord : la notion de genre est une horreur des plus arbitraires. Je n'utilisais l'argument qu'en toute ironie! Quand on voit ce qu'on regroupe dans le genre Drosophila, il faudrait fondre tout les genres de singes. A quand Homo paniscus, Homo pygmaeus, Homo gorilla ; voire Pan habilis, Pan sapiens?
Dans les faits, ce sont les papiers qui complètent ce billet de blog. Tout a commencé par ce coup de gueule sur SSAFT, puis, à l'occasion des premières données de génomique du consortium coelacanthe (http://www.pnas.org/content/107/8/3...) nous avons mis en forme avec Didier toute nos critiques en forme pour une revue dans Bioessay (http://onlinelibrary.wiley.com/doi/...). Du coup des généticiens des populations se sont désolidarisés de ce consortium et nous avons co-signé une nouvelle revue ensemble pour enfoncer le clou (http://www.tandfonline.com/doi/full...).
Comme quoi écrire un article de blog, ça peut être fécond pour sa recherche !
Patrick
25 De Croco-surchauffe, Croco-maman, et théorie de l’attachement – - 02/05/2018, 18:42
Croco-surchauffe, Croco-maman, et théorie de l’attachement –
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